(Québec) Le projet Nodélo aux limites nord de Québec ne manque ni d'ambition ni de prétention. «Un milieu urbain réinventé», vantent ses promoteurs.
Vrai que Nodélo bouscule le modèle traditionnel des banlieues avec ses petits bungalows: mixité des résidences, services et commerces; densité élevée (jusqu'à 1600 logements), espaces verts, plan d'eau, proximité avec des services locaux; construction «écoresponsable» avec orientations au sud, gestion des eaux de pluie, etc.
L'image qu'on se fait d'un quartier vert, vivant et agréable à vivre. Beaucoup mieux que le modèle précédent.
Sans compter les taxes pour la Ville. L'investissement pourrait atteindre 500 millions $ si toutes les phases sont réalisées.
De ce point de vue, je comprends l'irritation des élus de Québec contre les «bloqueurs de projet».
Advenant un «non» lors d'un référendum, la Ville ne pourrait pas imposer le projet Nodélo comme elle l'a fait dans le quartier Maria-Goretti, en invoquant sa charte.
Est-il dans l'intérêt public qu'une centaine de personnes puissent bloquer un projet important pour une ville?
On est tous favorables à la consultation et à la démocratie, mais se pourrait-il que les citoyens aient parfois trop de pouvoir? Le réflexe du «pas dans ma cour» provoque souvent le braquage contre toute forme de développement.
Dans ce cas-ci, le projet fera disparaître le boisé des Soeurs du Bon-Pasteur où les citoyens vont marcher, skier ou faire se vider leur chien. Il provoquera une augmentation de la circulation et du bruit, etc.
Il est légitime pour des citoyens de vouloir protéger leur voisinage et leur qualité de vie.
Mais il l'est aussi pour des élus de vouloir orienter le développement du territoire dans la recherche de l'intérêt supérieur de la ville. Il faut trouver l'équilibre.
Le conseiller Richard Côté a souhaité cette semaine une modification à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Le ministre des Affaires municipales, Sylvain Gaudreault, se dit «ouvert» à discuter.
Je trouve cependant qu'avec le projet Nodélo, les élus choisissent un mauvais cheval de bataille pour relancer le débat.
Malgré ses mérites, le projet Nodélo est un cas patent d'étalement urbain. Exactement ce que la Ville dit vouloir éviter.
Le quartier est aux limites de l'urbanisation. Il nécessite un déboisement important, l'ouverture de nouvelles rues et services publics.
Étant loin des pôles d'emplois et lignes de transport en commun, on imagine mal que les citoyens se déplacent autrement qu'en voiture.
Le mot «écoquartier» est beaucoup galvaudé par les promoteurs à des fins de marketing. Il perd ici tout son sens.
Ce qui serait un excellent projet à proximité du centre-ville ou dans une banlieue à requalifier devient discutable dans un boisé de la périphérie. En tout cas, certainement moins urgent.
Si le boisé doit être développé de toute façon, sans doute vaut-il mieux que ce soit sur le modèle de Nodélo. Mais est-ce vraiment par là qu'il faut commencer?
Un des citoyens opposés au projet, M. Denis Béland, déplore le manque d'engagement des élus de Québec dans ce débat.
Il n'appartient pas aux citoyens de négocier avec le promoteur du projet Nodélo, croit-il. Il plaide que c'est le rôle de la Ville de fixer les balises et d'arbitrer le débat. Le citoyen a raison.
Mais les citoyens se plaignent aussi d'être laissés à l'écart par des promoteurs et des villes qui s'entendent en catimini et les placent devant des faits accomplis.
Si le promoteur du projet Nobélo veut parler aux citoyens pour expliquer son projet et, qui sait, le modifier pour le rendre plus acceptable pour ses voisins, ceux-ci devraient s'en réjouir plutôt que de s'en inquiéter.
Mais peut-être est-il plus facile de dire non. Ça permet de continuer à critiquer sans obligation d'être raisonnable.