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03/10/2020 - Le Soleil - François Bourque - Maria-Goretti: le défi de réparer le passé

CHRONIQUE / Le promoteur qui a repris le chantier des condos Maria-Goretti à Charlesbourg savait qu’il s’attaquait à un «dossier pas facile».

Directeur du développement résidentiel chez Drolet Construction, Daniel Renaud, connaissait «l’historique du dossier». Savait que les gens «en voulaient encore à la Ville de Québec» de leur avoir imposé en 2011 un projet dont ils ne voulaient pas. Mais il n’avait pas mesuré à quel point «l’amertume était présente». Pour certains, un sentiment de «vengeance».

Ce sentiment se retourne aujourd’hui contre lui. Il ne s’en plaint pas, mais il constate.

Au début septembre, des citoyens se sont mobilisés. Quelque 161 signatures dans le voisinage. Assez pour forcer un référendum.

Le promoteur croyait pourtant avoir trouvé «un bon projet de compromis». Dans la dernière année, il avait même mandaté la firme MU Conseils pour aller à la rencontre des citoyens et institutions du quartier.

Plusieurs citoyens ont cependant refusé de participer.

«La déception et la frustration accumulée pèsent aujourd’hui dans la balance», analyse Carole-Anne Tanguay de MU Conseils.

Le projet prévoyait 15 maisons en rangée et une aile de six étages (80 unités) jouxtée au bâtiment existant (63 condos). Total : 158 unités. Moins que les 175 prévues par le promoteur précédent. Mais trop encore au goût de beaucoup de citoyens.

Ceux-ci craignent une hausse de la circulation. Une préoccupation légitime, avec l’école primaire juste en face. Mais le mauvais souvenir de 2011 y est aussi pour quelque chose.

À l’époque, les citoyens du voisinage avaient aussi signé le registre pour forcer la tenue d’un référendum. Ils dénonçaient une «densification agressive et inappropriée pour un quartier de maisons unifamiliales».

L’administration Labeaume fut cependant inflexible et a brandi la Charte de la Ville (art 74.4) pour imposer le changement de zonage.

Seule la première phase du projet fut finalement réalisée. Un immeuble équivalent à sept étages qui «détonne» avec le voisinage, constate aujourd’hui le promoteur Renaud.

Mais le mal est fait. Il faut vivre avec.

Sentant qu’il risquait de perdre le référendum, M. Renaud a choisi de retirer son projet et de retourner sur les planches à dessin.

Il reviendra cet automne avec une nouvelle proposition qui ira «dans le sens de ce que les gens nous disent».

Il ne veut pas en dire plus, voulant d’abord en parler à la Ville, aux voisins et aux propriétaires des condos existants.

Beaucoup de citoyens souhaitent davantage de maisons en rangée, moins d’unités de logement et un impact visuel moins lourd pour l’aile à construire.

Le promoteur dit les avoir entendus. Ça augure bien.

À la différence d’autres projets immobiliers, on ne sent pas ici d’opposition à de nouvelles constructions ni de «pas dans ma cour».

Au contraire, une «grande proportion» de citoyens sont contents à l’idée de compléter le projet et «tourner la page», a perçu Mme Tanguay.

Le terrain en friche et les murs de tôle blanche «temporaires» sur l’immeuble construit, ce n’est pas très joli. Les occupants des condos (seulement la moitié ont été vendus) n’ont jamais eu la piscine extérieure et toutes les cases de stationnements promises à l’achat.

«Ce projet n’a fait que des perdants […] Maintenant, il faut terminer ce gâchis», résume le citoyen Bruno Labrecque, qui habite quelques rues plus loin.

Il faudra s’attaquer aussi au problème de circulation. Des citoyens en tiennent les 63 premiers condos responsables, mais la réalité n’est pas si simple.

L’école primaire des Constellations, qui comptait 280 élèves en 2015, en accueille cet automne 439, rapporte la directrice Renée Lapierre. Une bonne nouvelle. Le quartier rajeunit et son école est grouillante.

Mais la moitié des élèves vont au service de garde, ce qui veut dire qu’ils arrivent et repartent en auto. Cela crée de la circulation.

Il y a aussi le CHSLD voisin, les conciergeries de l’avenue Paul-Comtois et la circulation de transit en provenance de la sortie d’autoroute donnant sur la 76e rue.

Les nouvelles unités de logement ajouteront à la pression. Un comité de la Ville est à la recherche de solutions.

Les temps changent. Les promoteurs aussi et je dirais et même la Ville. Il y a (souvent) aujourd’hui une meilleure sensibilité à l’impact des projets.

Ça donne le droit d’espérer qu’il y aura moins de coups de force pour imposer des projets dont l’intérêt public n’est pas évident, comme à Maria-Goretti ou au Phare (si Phare il y a encore).

Je laisse le citoyen Labrecque conclure :

«Personnellement j’aimerais percevoir un semblant de mea culpa de la Ville avec une intention honnête de terminer de la moins pire manière ce projet qui n’aurait jamais dû être. Évidemment je rêve en couleurs!»

https://www.lesoleil.com/chroniques/francois-bourque/maria-goretti-le-defi-de-reparer-le-passe-c1fa71b6a85421cb5d27416afe175b1f

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